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Transformation finance – Comment la direction financière de Veolia fait de la data un levier de performance dans ses activités de recyclage 

Découvrez la Vision de Thomas Rousseau, DAF chez Veolia Propreté France Recycling

« Une notion importante est celle de la prise de risque, traditionnellement étrangère à la culture financière : nous devons être capables de nous transformer par opportunité et non uniquement par contrainte. »

Dans un contexte de spécialisation croissante et de montée en puissance des enjeux environnementaux, la direction financière joue un rôle central dans l’évolution des modèles économiques.

Chez Veolia Propreté France Recycling, cette ambition se traduit par une démarche de transformation pragmatique et structurée autour de la donnée. Thomas Rousseau, CFO de la filiale, revient dans cet entretien sur les fondements de cette mutation : exploitation avancée des données issues de plus de 80 000 expéditions annuelles, collaboration étroite avec la DSI, mise en place d’un référentiel commun, structuration d’une gouvernance data, et développement de nouvelles compétences autour de l’analyse et de la visualisation. Objectif : piloter la performance matière avec précision, renforcer la transparence vis-à-vis des clients, et faire évoluer le rôle du financier vers celui de véritable partenaire stratégique de la transformation.

Son témoignage illustre les enjeux explorés à l’occasion du Finance Forward, événement organisé le 24 juin par Micropole et Talan pour trouver les réponses aux défis inédits auxquels font face les directions financières : entre exigence des actionnaires, modernisation technologique, enjeux de pilotage, conformité et intelligence artificielle. 

À travers des retours d’expérience concrets et des prises de parole de décideurs, Finance Forward met en lumière une fonction finance en pleine évolution : plus agile, plus connectée au business, et résolument tournée vers la création de valeur.

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interview-ThomasRousseau-DAF-Veolia

Veolia Propreté France Recycling (VPFR) est une filiale du Groupe Veolia qui commercialise des matières premières issues de déchets auprès d’industriels qui les incorporent dans leurs processus de fabrication. Elle incarne ainsi l’étape finale du recyclage. Même si son activité tient du négoce, elle s’est transformée en une entreprise spécialisée dans la logistique et l’analyse de qualité matière au service de l’environnement, notamment sous la houlette de son CFO, Thomas Rousseau. Entretien.

Votre activité de recyclage et de valorisation des déchets a beaucoup évolué. Quel a été l’impact de cette transformation sur la fonction finance ?

Nous avons en réalité transformé la manière dont est perçue notre activité de valorisation des flux de matières issues de déchets.

Nos fournisseurs sont conscients de la valeur de la matière dont ils disposent (cartons, plastiques, métaux), et nos clients n’envisagent de s’approvisionner en matières recyclées que dans la mesure où cela représente une baisse de coûts.

Nous avons donc structuré notre modèle économique pour nous positionner comme un expert matière et pas un « broker » en déchets qui spéculerait sur des cours.  Le client final acquiert un produit au prix du marché, auquel s’ajoutent nos frais de logistique et de conditionnement. Cette transparence est essentielle pour justifier nos prix.

Cette évolution a exigé une analyse approfondie de notre structure de coûts afin d’optimiser l’efficacité et de réduire les dépenses. 

Comment avez-vous exploité la data pour piloter cette transformation ?

Nos 80 000 expéditions annuelles génèrent un volume considérable de données. Fort de mon expérience de sept ans à la direction informatique du groupe Veolia, j’ai piloté un projet majeur visant à exploiter pleinement le potentiel de ces données, en collaboration avec la Direction Informatique de VPFR.

Nous avons mis en place une collecte et une analyse de données robuste, allant au-delà des simples corrélations de nos prix avec les fluctuations de marché.  Coûts de transport, impact des non-conformités de matières, services connexes, tout est passé au crible.

VPFR disposait d’un outil de suivi des tonnages et des coûts, celui-ci était principalement transactionnel et ne permettait ni d’assurer la qualité des données, ni d’effectuer des analyses en temps réel. Notre démarche a consisté à établir un référentiel commun, pour garantir l’uniformité des définitions (livraison, type de matière, etc.) et à autoriser l’accès à la base de données en fonction des besoins. 

Thomas Rousseau DAF Veolia PFR

Il est nécessaire que les directeurs financiers s'investissent ​dans les questions informatiques, non pas en se substituant à la DSI, mais en étant capables d'exprimer des besoins précis et d'évaluer les solutions potentielles.

— Steven Bérard
DAF chez Veolia Propreté France Recycling

Avez-vous obtenu facilement les investissements technologiques nécessaires pour assurer cette transformation ?

Nous avons opté pour des solutions technologiques pragmatiques, notamment les outils de visualisation de données mis à disposition par la plateforme bureautique de référence au sein du groupe. Il restait à identifier, au sein de la Direction Informatique, la compétence permettant de répondre à notre expression de besoin. Le coût étant mineur, l’investissement n’a pas été difficile à obtenir. C’est ce qu’on peut appeler un “quick win”.

Outre ce cas précis, il existe un enjeu plus global de réactivité dans les investissements technologiques des directions financières. Ces dernières sont perçues comme des centre de coûts et lorsque les directions générales consentent à investir, c’est souvent de manière très ponctuelle : on va changer un système de fond en comble tous les dix ans.

Or, l’évolution rapide des technologies (optimisation du data management, migration des ERP vers le cloud, intégration de l’IA) exige une approche plus agile. Il est essentiel de repenser l’architecture de nos systèmes d’information selon une approche modulaire, faite d’éléments indépendants.

On peut privilégier des logiciels spécialisés (par exemple, pour le purchase to pay) aux solutions globales, ce qui permettra de profiter plus facilement des évolutions. Cette stratégie réduit également la dépendance aux mises à jour des éditeurs et évite les migrations toujours complexes des systèmes intégrés. Mais cela suppose le développement de compétences internes en matière d’interopérabilité des différents modules.

Comment se sont répartis les rôles entre IT et Finance pour réussir cette transformation ?

À mon arrivée, la fonction Data n’était pas structurée et le système d’information était rattaché à la direction financière. L’une de mes premières décisions a été de confier la responsabilité du SI à la direction des systèmes d’information, compte tenu de son expertise en matière d’infrastructure, d’administration technique et de support aux utilisateurs.

Par ailleurs, son rôle dans la migration de nos infrastructures vers le cloud public et de notre portefeuille applicatif vers des modèles Saas nous garantit de faire évoluer notre système d’information vers une architecture conforme à la politique du groupe.

La direction financière et la DSI collaborent étroitement dans le choix des solutions logicielles. Concernant la data, la direction financière conserve la responsabilité des aspects fonctionnels (définition des rôles et des accès, création du référentiel commun, etc.). Notre objectif était de déployer rapidement un outil opérationnel et de l’améliorer de manière continue, en privilégiant une approche de quick wins afin de favoriser l’adhésion des équipes.

Un comité de la donnée, regroupant la DSI, la direction financière et la direction commerciale, arbitre les évolutions souhaitées et évalue leur impact.

La réussite de ce projet démontre à quel point il est nécessaire que les directeurs financiers s’investissent ​dans les questions informatiques, non pas en se substituant à la DSI, mais en étant capables d’exprimer des besoins précis et d’évaluer les solutions potentielles.

Thomas Rousseau DAF Veolia PFR

La disponibilité de données qualitatives a un impact positif sur le recrutement et la fidélisation des talents.

— Thomas Rousseau
DAF chez Veolia Propreté France Recycling

Quel est l’impact de ce type de transformation sur la gestion des compétences ?

Cette transformation a permis de simplifier les processus d’arrêtés comptables et de contrôle de gestion, notamment en éliminant les extractions manuelles de données.

L’utilisation d’outils de visualisation a également amélioré la détection des erreurs de facturation. Ces gains de productivité au sein du contrôle de gestion nous ont permis de ne pas remplacer certains départs.

Parallèlement, nous avons intégré des compétences spécialisées dans la collecte et l’analyse des données. Le rôle du contrôleur de gestion a évolué : il se concentre maintenant sur l’interprétation des données pour optimiser le suivi des marges.

Nous sommes désormais en mesure d‘identifier et de corriger rapidement les problèmes, tandis qu’auparavant, plusieurs mois pouvaient être nécessaires au constat d’une baisse de rentabilité et de ses causes. De plus, nous avons développé une connaissance plus approfondie du marché, nous permettant d’anticiper les besoins de nos clients industriels.

Ces analyses de données financières ont-elles procuré des gains opérationnels au-delà de la finance ?

Notre communication avec les clients est devenue plus claire et transparente. Par ailleurs, la disponibilité de données qualitatives a un impact positif sur le recrutement et la fidélisation des talents. En identifiant précisément les problèmes (par exemple, quelques livraisons problématiques sur un grand nombre), nous pouvons également mieux cibler les actions correctives et mobiliser les bonnes personnes pour les résoudre.

Avant, nous avions tendance à solliciter un grand nombre de collaborateurs de manière peu efficace parce que nous ne savions pas où agir.

Comment va évoluer le rôle du directeur financier à l’aune de ces transformations ?

Je travaille en étroite collaboration avec le directeur de cette activité, qui se concentre sur les enjeux business, tandis que je me focalise sur les aspects financiers de notre transformation. Notre système d’information, distinct de celui du groupe, et notre activité qui est très spécifique, me confèrent une grande autonomie.

De manière générale, l’adaptation constante aux évolutions du marché et aux nouvelles réglementations exige des directeurs financiers une vision axée sur les projets, allant au-delà de leurs habituelles compétences techniques.

Une autre notion importante est celle de la prise de risque, traditionnellement étrangère à la culture financière : nous devons être capables de nous transformer par opportunité et non uniquement par contrainte. Sur ce plan, l’arrivée de l’IA peut favoriser la mise en place de modèles prédictifs, en combinant par exemple des données internes et externes (marché, météorologie, etc.). Cela pourrait ouvrir de nouvelles perspectives aux directeurs financiers grâce à des scénarios prospectifs fiables et donc leur conférer un rôle bien plus stratégique au service de l’entreprise.

Enfin, je crois qu’il est important, dans un monde où la communication autour de l’IA perturbe les esprits sur le devenir de certains métiers, que les directeurs financiers anticipent le devenir de leur fonction et l’évolution nécessaire des compétences de leurs équipes.

Vous souhaitez découvrir de nouveaux témoignages ? Nous vous donnons rendez-vous le 24 juin au Finance Forward, événement dédié aux enjeux des directions financières !

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